Episode 1 : Les savoirs interdits

[Maria-Karla]

Maria-Karla écouta Anastasia parler. Son amie en savait à peu près autant qu'elle, ce qui était normal ; ce qui l'était un peu moins, c'était que soeur Maria-Alma semblait ne pas en savoir plus qu'elles.
J'avoue que j'ai du mal à y croire. Je ne pense pas que nous soyons plus malignes qu'elle, et elle n'aurait pas vu en vingt ans ce que nous avons découvert en deux jours ?...

[Le créateur]

La sœur écoute les explications de l'adolescente.

"La langue dans laquelle nous parlons est la même que celle de nombreux livres de cette bibliothèque, et il n'y a pourtant aucun lien entre eux et nous. Pour l'instant, je vous déconseille de prétendre avoir lu ce livre. Vous pourriez être prises pour des menteuses, ou même pire pour des hérétiques. Si vous retrouvez ce livre, essayer de venir me prévenir, afin que je puisse le replacer en vitesse dans la réserve. Tant que je n'ai pas trouvé la pensionnaire qui s'amuse à le déplacer et surtout qui a trouvé un moyen d'entrer dans la réserve, ce genre de phénomène risque d'arriver de nouveau."

La sœur se lève, comme prête à sortir.

"Vous aviez d'autres questions ?"

[Maria-Karla]

"Non, ma soeur ... Merci pour vos explications et vos conseils ..."
C'est inutile d'en demander plus ... Elle ne répondra pas. Soit elle ne sait rien, soit elle fait semblant de ne rien savoir, mais nous ne pourrons rien apprendre de plus de cette manière ...
Maria-Karla fut soulagée de constater que soeur Maria-Alma n'avait pas compris qu'elle avait jeté un sort. Enfin, soit elle ne l'avait pas compris, soit elle avait fait exprès de ne pas l'entendre. Soeur Maria-Alma ne les dénoncerait pas et ne les punirait pas, du moins si elles en restaient là. Mais elle ne les aiderait pas non plus.
Si nous voulons en savoir plus sur ce livre, il va falloir s'y prendre autrement ...
Elle se surprit à penser cela alors que peu de temps avant, elle avait pensé ne plus jamais s'approcher de ce livre vu les risques qu'elle avait courus dans la cuisine. Mais à présent qu'elle était pratiquement sûre que ce livre et les étranges prières du couvent avaient un rapport - quoi qu'en puisse dire soeur Maria-Alma - c'était plus fort qu'elle, il fallait qu'elle découvre de quoi il retournait.
Maria-Karla se leva elle aussi et se dirigea vers la sortie.
"Tu viens, Anastasia ?"
Elle lui fit un léger signe de tête, discret, comme pour lui faire comprendre qu'il ne servait à rien de s'attarder davantage.

[Le créateur]

La sœur laisse sortir les deux pensionnaires, puis sort elle-même et ferme la porte derrière elle.

"Le dîner est dans peu de temps, profitez des quelques minutes de temps libre qu'il vous reste."

Elle retourne ensuite vers la chapelle. Les deux amies se retrouvent seules, au détail près que de nombreuses autres pensionnaires sont en train de flâner dans la cour, en bas des escaliers.

[Anastasia]

- je ne m'attendais pas à ça déclare Anastasia aussitôt qu'elle se trouve hors de vue de Soeur Marai Alama, c'est vraiment surprenant, soit elle est sincère et je pense qu'elle l'est en fait, soit les choses sont plus complexes que ce que l'on croit: elle sait peut être des choses qu'elle veut nous cacher pour nous protéger...
Cette pensée déplut à Anastasia et celà ne paraissait pas coller à Soeur Maria Alma qui lui semblait souvent ressembler à un ange.
- Je pense que l'on peut lui faire confiance en fait et qu'elle a dû dire la vérité. Je ne pense pas que le mensonge soit d'ailleurs considéré avec bienveillance chez les soeurs en général , même si je suis sure que certaines d'entre elles m'espionnent pour le compte de ma tante. Tu as bien fait de ne rien dire de précis pour ce qui s'est passé dans la cuisine. De toute manière, nous sommes tombées sur ce livre par hazard, on ne peut pas nous traiter en hérétiques parce que nous avons lu par hazard un livre qui était dans la bibliothèque du couvent. Le couvent lui même et les soeurs risquent plus que nous dans cette affaire il me semble: pourquoi ce livre est-il là d'abord ?

[Maria-Karla]

Maria-Karla vérifia qu'elles étaient à peu près hors de portée auditive des pensionnaires et surtout des soeurs, avant de répondre :
"En tout cas, ce n'est pas auprès de soeur Maria-Alma que nous aurons des réponses. Soit elle ne sait effectivement rien, soit elle ne veut rien savoir, peut-être ... Mais je ne pense pas que les soeurs ou le couvent soient en danger. Si les prières et le livre sont ici depuis au moins vingt ans, s'il avait dû arriver quelque chose, ce serait sans doute déjà arrivé ..."
Vingt ans ?... Soudain, Maria-Karla repensa aux paroles de soeur Maria-Alma. Elle n'y avait pas fait attention sur le coup mais ...
"Au fait, quel âge a soeur Maria-Alma, à ton avis ? Elle dit qu'elle est au couvent depuis vingt ans mais je pensais qu'elle n'était guère plus âgée que nous ... À moins qu'elle soit ici depuis sa naissance ..."
Elle ne put s'empêcher de repenser aux prières que les soeurs leur faisaient répéter. Le temps. Protéger contre le temps.
Elle chassa immédiatement cette idée de sa tête.
Non ... je deviens folle ou quoi ? Je pense à des choses qui ne peuvent pas exister ...
D'un autre côté, avant de jouer à l'apprentie sorcière dans la cuisine, elle n'avait pas pensé un instant qu'une formule empêchant l'eau de couler puisse exister ...
"Anastasia ... à quoi ça te ferait penser si on disait 'protection contre le temps' ?"

(PS HRP : ça s'écrit "hasard" ... "Hazard" est un mot anglais qui ne désigne même pas le hasard, mais le danger ...)

[Anastasia]

Anastasia regarda son amie stupéfaite.
- Pourquoi je n'y ai pas moi-même pensé plus tôt dit-elle, tu as raison, tout celà me parait enfin logique. Je crois que tu as mis le doigt dessus: les soeurs pratiquent un enchantement qui leur permet de rester jeune éternellement. C'est fou, mais celà me paraît clair. Est- ce que celà signifie que le sprières que nous entendons nous permettent à nous aussi de rester jeune tout le temps ou bien elles ne le font que pour elles-mêmes ? Dans tous les cas je comprends que Soeur Marai Alma n'est pas envie d'en parler plus que ça.
Anastasia était sidérée de ce qu'elle venait de découvrir. Les soeurs ont la possibilité d'arrêter le temps ? Mais dans ce cas, quel jour sommes-nous ?

[Maria-Karla]

"Oh ... tout ça me fait peur ... Mais il faut qu'on en sache plus. Puisque le dîner va bientôt avoir lieu, allons-y et tâchons de bien écouter les prières. Peut-être qu'en y faisant bien attention, nous saurons mieux ce qu'elles cherchent à faire exactement avec le temps."
Pourvu qu'il ne s'agisse pas d'arrêter complètement le temps ... Si le couvent était figé dans le temps comme l'eau de la pompe a été figée dans l'évier ce midi ?... Si c'est le cas, je ne reverrai plus jamais ma maison ...
Elle tourna brutalement le dos à Anastasia afin que celle-ci ne voie pas ses larmes, et se dirigea vers le réfectoire.

[Anastasia]

Anastasia se précipité vers son amie et l'attrappa par le bras:
- Tu viens de rentrer au couvent , te souviens-tu de la date exacte à laquelle tu es rentrée ?

(Note : Anastasia sait qu'elle est là depuis 4 mois, la réponse de Maria Karla devrait lui indiquer s'il y a réellement eu arrêt du temps total ou partiel par rapport à l'extérieur ou non, ne serait-ce qu'à "vue de nez" )

[Maria-Karla]

"Mais ... bien sûr. C'était hier, le 20 septembre."
Maria-Karla fut à nouveau surprise de voir Anastasia lui attraper le bras, mais elle ne dit rien. Après tout, c'était sa façon de faire. Mais il lui faudrait sans doute un certain temps pour s'y habituer.

[Le créateur]

En faisant le calcul Anastasia peut en conclure qu'elle est au couvent depuis 4 mois, elle a l'impression qu'elle est là depuis un peu plus longtemps, mais rien de bien choquant.

[Anastasia]

Anastasia quelque peu calmé aperçut seulement alors le trouble de Marai Karla et ses larmes dans les yeux. Elle se sentit quelque peu gênée.
- Je suis désolée, fit-elle, tu sais... cette histoire me bouleverse aussi.

[Maria-Karla]

"Qui ne serait pas bouleversé par ce qui se passe ici ?..."
Maria-Karla sécha ses larmes.
"Je suis stupide de pleurer. De toute façon, nous ne pourrons rien faire tant que nous n'en saurons pas davantage, alors il est inutile de pleurer pour ça ... Au fait, quand es-tu entrée ici, toi ? Tu n'avais rien vu de particulier avant ?"
Elle reprit la route vers le réfectoire. Le dîner allait bientôt commencer et il valait mieux ne pas se faire remarquer en y arrivant en retard.

[Le créateur]

La bibliothèque n'avait pas été ouverte aux pensionnaires jusqu'à aujourd'hui, d'habitude, les sœurs allaient elles-même récupérer des livres pour faire étudier les jeunes filles.

D'autres élèves sont en train de se diriger aussi vers le réfectoire. Dans quelques minutes, tout le monde y sera et la prière du dîner commencera.

[Anastasia]

Je n'ai rien remarqué depuis à peu près 4 mois que je suis ici. La bibliothèque vient d'ouvrir en fait et je n'avais jamais vu ce livre. La seule chose qui m'a inquiétée c'est la certitude que ma tante a demandé aux soeurs de m'espionner pour son compte, mais en fait quand je vois Marai Alma, je pense que seule la mère supérieure le fait.