Episode 1 : Les savoirs interdits

[Anastasia]

-Ah, répondit Anastasia à Sophia en haussant le ton de sa voix , je suis désolée. Elle venait de comprendre qu'elle entendait mal.
Elle empoigna un côté de la malle de Maria-Karla afin de l'aider à la monter.
- Je crois que nous avons toutes le même problème avec cet escalier lorsqu'il s'agit d'y trimballer nos affaires dit-elle en souriant.
En entendant ce que venait de dire Maria-Karla, elle fut surprise: c'est la première fois que tu viens dans un couvent ? Quand je pense que je connais la plupart du pays fit-elle en riant. Mais c'est quand même un des plus strict soufflat'elle à mi-voix (et tant pis si Sophia n'avait pas entendu sa dernière phrase, elle ne voulait pas qu'une soeur puisse l'entendre).

[Maria-Karla]

Quand Anastasia prit sa malle pour l'aider, Maria-Karla inclina la tête en signe de remerciement.
"En fait ... pendant des années, il n'a jamais été question de m'envoyer au couvent. Ma tante m'a éduquée elle-même, elle m'a appris à lire, à écrire, à compter, à coudre, et un peu toutes sortes de choses, et je pensais que c'était suffisant. La lecture et la broderie, il n'y a rien de tel pour occuper mon temps libre ..."
"Mais il y a peu de temps, elle a décidé de m'envoyer ici. Selon elle, c'est pour que j'aie une bonne éducation religieuse et pour que je me fasse des amies de mon âge. Il faut avouer que j'ai toujours vécu un peu isolée et que je n'ai pas vraiment d'amies ..."
La dernière phrase d'Anastasia réveilla cependant les craintes de Maria-Karla. Pourquoi sa tante avait-elle choisi justement le couvent le plus strict ? Comme cela avait été le cas peu avant son départ, quelque chose lui souffla que sa présence à la maison n'était plus souhaitée ... mais pourquoi, après toutes ces années paisibles ?

[Sophia]

Tentant tant bien que mal de tirer son violoncelle, qui était presque aussi haut qu'elle, elle finit par le soulever au dessus de sa tête et elle marcha d'un pas assuré le fragile escalier. Rendue presque en haut, elle déposa ses affaires sur la terre ferme et revint vers les autres filles.

-J'ai vécu dans des endroits où il manquait parfois trois marches de suite aux escaliers. Si je peux aider quelqu'un...

D'en haut, elle avait manqué le début de la conversation entre Anastasia et Maria-Karla. Mais elle arriva et lut sur les lèvres un "c'est surement le plus strict."

[Maria-Karla]

"Non, ça ira ... Nous sommes presque arrivées ..."
Maria-Karla s'en voulut un instant de parler au nom d'Anastasia, mais elle voulait surtout éviter à Sophia, qui avait déjà dû monter elle-même ses affaires, de faire des efforts inutiles. Elle décida d'accélérer un peu, tout en faisant bien attention aux marches, afin d'en finir au plus vite avec l'ascension de sa malle.
Une fois en haut, elle déclara :
"De toute façon, je n'aurai pas à refaire cet exercice avant longtemps ... enfin j'espère ..."

[Anastasia]

Anastasia sourit à la déclaration de Maria-Karla. Elle-même avait "déménagé" tant de fois...
- Je te l'espère aussi déclara t'elle en riant, je sais ce que c'est que de devoir trimbaler un tas d'affaire un peu partout.
Elle haussa le ton de sa voix en se tournant vers Sophia:
- Tu es la seule fille que j'ai connue qui joue de son propre instrument de musique. Toutes celles que j'ai connues avant, jouaient seulement de l'orgue ou du clavecin et il s'agissait d'instruments appartenant au couvent, ce qui est d'ailleurs assez rare en fait. J'espère que tu nous donneras des concerts privés fit-elle avec un clin d'oeil.

[Sophia]

Sophia sourit. Elle aimait bien ces deux filles, mais Alexandra lui semblait plus froide. Quant à Eva, elle ne parlait pas beaucoup et semblait très gênée. La blondinette se dit cependant qu'elle devait avoir ses raisons. Anastasia lui parla de son violoncelle.

-Je ne suis pas sûre qu'il soit permi de jouer hors des ateliers, mais c'est sûr que je vais jouer avec la chorale.

[Maria-Karla]

"J'aimerais bien t'entendre jouer" dit Maria-Karla, tout en se demandant s'il était bien facile pour une fille qui semblait à moitié sourde de jouer d'un quelconque instrument.
Mais entendre parler d'une chorale la fit sourire.
"J'ai hâte de chanter à la chorale, si je peux. Chez ma tante, il m'arrivait de chanter. J'ai aussi appris quelques chansons originales, mais ... je suppose qu'ici, on ne peut chanter que des chants religieux."
L'image d'un luth et de certaines chansons estompèrent son sourire.

[Anastasia]

Anastasia regarda autour d'elle avant de déclarer tout bas:
- Franchement, rien ne nous empêche de faire de la musique pour nous-mêmes, à partir du moment où personne ne nous entend... Et si vous allez à la chorale, je veux bien en faire partie. Elle espérait que Sophia avait compris ce qu'elle venait de dire.

[Le créateur]

Eva ne semble pas trop peiner à monter sa malle, un peu plus petite que les vôtres. Une fois en haut, elle semble cependant devoir reprendre son souffle.

"Vous... ne trouvez pas... que c'est un peu lugubre quand même ?... Je n'ai connu pour l'instant que des pièces portant des tapisseries... la pierre nue, ça fait... extérieur..."

A mesure que le soleil décline, le couloir devient de plus en plus sombre, ce qui n'a pas grand chose d'étonnant puisque la seule ouverture existante est un meurtrière au niveau de l'escalier. Le couloir s'enfonce pour rejoindre à nouveau l'aile nord dans l'angle du bâtiment.

[Maria-Karla]

Maria-Karla jeta un coup d'oeil au couloir sombre et froid. Elle trouvait aussi que cela contrastait avec les grandes fenêtres et les tapisseries riantes de la maison de sa tante ... Elle comprenait très bien ce qu'Eva pouvait ressentir.
"Moi aussi, je trouve ça lugubre ... Enfin, c'est un couvent, l'austérité transparaît même dans les bâtiments ... Quand je pense à la maison de ma tante, avec les grandes fenêtres qui laissaient entrer le soleil sur les tapisseries ..."
Elle continua à parler pour elle-même, partant dans sa rêverie ...
"Le petit salon avec ses tableaux ... La balançoire dans le grand chêne du jardin et ..."
Sa main rencontra le médaillon dans sa poche et elle s'arrêta net, un peu gênée que les autres l'aient entendue rêver à voix haute. Elle fit semblant de s'intéresser aux chambres et regarda lesquelles étaient libres.

[Sophia]

Sophia comprit ce que dit Anastasia et hocha la tête en signe d'acquiescement. Eva avait enfin prononcé quelques mots.

-J'ai connu pire...

[Alexandra]

Alexandra continue à monter, parfois elle s’arrêter pour attendre ses camarades, elle les écoute mais ne prend pas par à la conversation, préférant penser d’elle-même, oui le lieu est lugubre, oui il y a rien, pire c’est austère et froid et pourtant c’est ainsi. Elle arrive alors à l’ouverture qui mène au chambre, signant la fin de l’escalier et le dur labeur de ses amies, enfin connaissances. Nuls mots ne sont sortis de ses lèvres, alors que son visage de marbre les toises un instant déclarant alors un simple Nous sommes bientôt arrivé.

[Maria-Karla]

Maria-Karla lâcha son médaillon et sortit sa main de sa poche, puis décida de demander à Eva :
"Et vous, Eva ... où étiez-vous avant de venir ici ?..."

[Le créateur]

Eva semble étonnée de la question puis répond :

"Oh, hé bien, j'étais d'abord à Prague pendant mon enfance et on est ensuite partis dans le nord du saint empire germanique et j'étais donc dans un autre couvent 3 ans. Et là, nous sommes à peine arrivés à Vienne, mes parents voulaient que je continue ma formation au couvent... Mais je préférais l'autre, il était mieux décoré... Humblement, mais décoré quand même."

Les cellules sont des chambres simples, tout aussi sommaires que les couloirs. Il y a une malle pour mettre les vêtements et un lit. Sur chaque tablette de chevet, il y a une bible et une bougie dans un support tout ce qu'il y a de plus simple. Les fenêtres sont de fines meurtrières mais possèdent quand même une vitre, empêchant la plupart des courants d'air. Les pierres semblent suinter un peu d'humidité, sans doute dû à la pluie de cette journée et à quelques imperfections du toit.

[Sophia]

Sophia écouta ce que disait Eva. Mieux décoré... n'était-elle pas un peu trop habituée au confort ? Elle trouvait cette école magnifique comparativement à celle d'Égypte qu'elle fréquentait avant. Sophia arriva devant sa chambre. Son nom avait été écrit sur un papier, épinglé sur la porte.

-Bon, je crois que ma chambre est ici. Je vais déposer mes trucs et je reviens. Je crois qu'il faudra se rendre au réfectoire.

Elle alla dans la chambre, ferma la porte, s'assit sur son lit et déballa son violoncelle. Elle s'assura qu'il n'avait pas été endomagé par le voyage avant de le reposer dans son étuit. Elle sortit.