Maria-Karla assista impuissante à sa disparition. Elle n'eut qu'un instant la présence d'esprit de faire un geste de dénégation à la domestique. Il était inutile de prévenir sa tante, elle s'en rendait compte à présent et cela ne faisait qu'ajouter à sa douleur. Adrien ne s'était pas contenté de disparaître : c'était comme s'il n'avait jamais existé...
Maria-Karla a écrit:Une partie de ma jeunesse est morte ce jour-là. La plus importante. Je crois même que d'une certaine manière, je suis morte ce jour-là.
C'était ce que Maria-Karla devait écrire plus tard dans ses mémoires. Mémoires qu'elle ne publierait sûrement jamais car elle y avait aussi relaté ses missions au service de l'impératrice Maria-Theresa, dont certaines avaient peut-être pesé lourd dans l'histoire de l'empire. Mais peut-être pas autant que la destruction du couvent et de ses sœurs sorcières.
Obéissant à Adrien, elle avait vécu pour lui. Elle ne s'était pas mariée, malgré les pressions de sa tante, ne trouvant aucun prétendant à la hauteur de l'homme idéal qu'elle avait créé sans le vouloir. A sa majorité, elle avait repris le négoce de ses parents en insistant pour le gérer elle-même, ce qui était exceptionnel pour une femme de son époque et lui avait attiré de l'admiration ou de vives réprobations selon les gens ; en tout cas, elle ne laissait ainsi aucun héritier à qui transmettre ses souvenirs, ce qui valait peut-être mieux car en-dehors d'Anastasia et Deborah, qui aurait pu la croire ? Ses mémoires, même si on les retrouvait un jour, ne pourraient sûrement être prises que pour une œuvre de fiction...
